La perle noire ou "poe rava" est la pièce maîtresse de l'économie polynésienne. En réalité, son appellation officielle est "perle de culture de Tahiti" car le noir n'est que l'une des multiples nuances qu'elle peut prendre.
Son histoire :
Les coquilles d'huître, appelées nacres, étaient déjà utilisées aux temps anciens pour la confection de parure de cérémonie, d'hameçons ou de leurres de pêche.
Au siècle dernier, elles étaient recherchées pour les besoins de l'industrie boutonnière européenne.
Dans les années 60, la surexploitation des bancs naturels et le déclin de la boutonnerie ont sonné le glas de l'activité. L'élevage d'huîtres pour la production de perles a pris le relais (à l'origine à Manihi) et les 1ères greffes ont eu lieu au début des années 70 ... les fermes perlières ont alors fait leur appartion.
La filière perlière :
La perle représente la deuxième source de revenus du Territoire. Principalement destinée à l'exportation, elle est écoulée en Asie, Europe et Amérique du Nord.
Le nombre de fermes perlières a connu un boom spectaculaire depuis les années 90, comparable à une ruée vers l'or, qui s'est traduit par une surproduction et une baisse des cours.
Jusqu'à récemment, l'anarchie dans la distribution et la commercialisation des perles nuisait à l'image et à la qualité du produit, mais depuis la filière s'organise. Il existe un classement officiel de la qualité et un statut de négociant de perle professionnel. Ce système vise à éviter les ventes sauvages à bas prix pratiquées par les petits perliculteurs qui cassent le marché. Plusieurs syndicats de perliculteurs encadrent la profession et contibuent à la promotion du produit à l'étranger.
La perliculture :
La Polynésie possède un environnement idéal pour la culture d'huîtres perlières. L'espèce d'huître que l'on trouve ici s'appelle Pinctada margartifera qui à la différence d'autres espèces donne des perles de couleur foncée.
A l'état naturel, une huître ne produit une perle que lorsqu'un corps étranger s'est accidentellement introduit dans la coquille (fait rarissime). En réaction à cette intrusion, les cellules épithéliales du manteau, l'organe sécréteur de l'animal, vont fabriquer de la matière nacrière pour isoler ce corps étranger (grain de sable ou de corail) qui se recouvre progressivement de nacre. Pour l'éleveur, il s'agit de reproduire ce mécanisme naturel, en procédant à un élevage méthodique.
- Le collectage et l'élevage : la 1ère étape est le collectage. L'huître libère à certaines périodes de l'année ses produits sexuels qui sont fécondés en peline eau. Aprés une dérive de quelques semaines, les jeunes huîtres (le naissain) se fixent sur les coraux. Le perliculteur, en immergeant des collecteurs artificiels dans le lagon, capte le naissain puis l'attache sur des lignes d'élevage jusqu'à ce que les huîtres atteignent leur maturité.
- La greffe : La greffe est l'étape décisive du processus. La 1ère phase consiste à sacrifier une huître parfaitement saine, dite huître donneuse. Un morceau de son manteau est prélevé et débité en une cinquantaine de minuscules lambeaux, les greffons. La 2ème phase est la greffe stricto sensu. L'huître receveuse est fixée sur un support et maintenue ouverte par une pince. Dans un 1er temps, le greffeur, à l'aide d'un scalpel, incise par l'arrière la gonade (organe reproducteur) et y dépose le greffon. Puis il introduit le nucléus (bille de tailles différentes issue d'une moule du Mississipi qui contient un "antibiotique naturel, évitant ainsi les nombreux rejets rencontrés auparavant) dans la gonade pour qu'elle soit en contact avec le greffon.
Les cellules du greffon se développent autour du nucléus pour former le sac perlier qui, une fois fermé, sécrètera la matière nacrière.
Les huîtres greffées sont placées dans des bourriches (paniers métalliques) pour éviter qu'elles ne soient mangées par les balistes, les dieudons, les raies léopart, les perroquets ... elles sont ensuite réimmergées, suspendues en chapelets et nettoyées régulièrement.
Couche aprés couche, la nacre s'épaissit autour du nucléus au rythme annuel de 1 mm. Il faut compter 18 mois pour procéder à la 1ère récolte, une seconde implantation (surgreffe) peut être effectuée avec un nouveau nucléus pour obtenir une 2ème perle 15 mois plus tard. Lors de la récolte et de la 1ère greffe, les rejets sont trés fréquents (seulement 2% des perles récoltées sont parfaites!), la 2ème récolte, le taux de rejet est de moins de 10%.
Jusqu'à une époque récente, les greffeurs étaient essentiellement asiatiques (du fait de leur excellent doigté), aujourd'hui ils sont peu à peu remplacés par des polynésiens formés au Centre des métiers de la nacre et de la perliculture crée à Rangiroa. Les greffeurs sont itinérants et vont de ferme en ferme, ils ont une côte (chaque jour, le nombre de nacres greffées est noté, la côte dépend de la récolte ... ).
Choix d'une perle :
Plusieurs critères conditionnent leur valeur :
- le calibre (de 8.5 à 18 mm),
- la forme (ronde, parfaitement sphérique, cerclée, baroque càd asymétrique),
- la qualité (absence de piqûres, de rayures, de taches) et
- la couleur.
"Perle noire" est trés réducteur : la perle issue de la Pinctada margaritifera couvre un large spectre allant du blanc nacré au noir, en passant par l'aubergine, le champagne, l'aile de mouche.
L'orient (reflet irisé) et le lustre (effet de miroir, brillance) entrent aussi en ligne de compte.
Les bijoutiers classent les perles en 4 catégories : A, B, C, D selon des critères précis.
Une A possède un trés beau lustre et ses imperfections sont localisées sur moins de 10% de sa surface. La forme n'intervient pas dans ce classement ; une perle cerclée ou baroque peut être classée A.
Hormis ces critères et cette classification, il n'existe pas de règle. Le choix d'une perle est avant tout un coup de coeur.
Keshi et Mabe :
Le keshi et le mabe (termes japonais) désignent 2 autres produits issus de la culture des perles.
- Le keshi est de la nacre pure, une perle sans nucléus. Il arrive en effet, que celui ci soit rejeté mais le greffon sécréteur continue à produire de la nacre. Son diamètre varie de 2 à 8 mm et sa forme est souvent baroque. Le perliculteur ne le découvre qu'au moment de la récolte.
- Le mabe résulte d'une manipulation volontaire. Le technicien colle un moule en plastique sur la face interne de la coquille. L'huître réagit en recouvrant peu à peu le moule par des couches de nacre. Aprés quelques mois, il est découpé avec un disque diamanté et démoulé. On obtient alors un mabe pur et creux. On le remplit avec de la résine expoy et on soude une plaquette de nacre qui servira de socle.
Entretenir votre perle :
Pour que la perle conserve sont lustre oridinel, essuyez-la de temps à autre avec une peau de chamois ou un tissu de coton légèrement imbibé d'huile d'amande douce. Evitez de la mettre en contact avec des parfums et des laques qui pourraient nuire à son éclat.
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